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Proposée depuis trois ans au sein de la maternité athoise, cette prise en charge particulière est relativement rare et exceptionnelle sur le territoire belge. Alliant bien-être et sécurité, la césarienne snoezelen permet aux parents de vivre ce moment souvent anxiogène de manière plus paisible en accord avec leurs attentes. Le Dr Daniela Burrini, gynécologue, et Céline Mattelaer, Sage-femme Cheffe d’Unité de la Maternité des Dix Lunes du site d’Ath offrent une vue d’ensemble sur cette expérience.

 

 

 

  • Qu’est-ce que le snoezelen ?

Développé dans les années 1970, le snoezelen est une pratique multisensorielle visant à induire de la détente et du confort à la personne stimulée dans une ambiance sécurisante et apaisante. De manière générale, cette stimulation sensorielle est souvent utilisée en psychiatrie, auprès des enfants porteurs d’un handicap ou bien comme thérapie d’accompagnement pour les patients en fin de vie.

  • Qu’est-ce que la césarienne snoezelen ?

Il s’agit d’une césarienne complètement personnalisée durant laquelle l’équipe crée autour des parents une ambiance qui se veut la plus sereine et chaleureuse possible. La procédure est totalement adaptée pour répondre aux besoins et aux attentes du couple, en fonction de ce qu’ils ont déjà vécu, de leurs craintes et de leurs peurs. Pour ce faire, certains aspects de la césarienne « classique » sont alors ajustés. « La césarienne snoezelen, c’est respecter le moment de l’arrivée du bébé. On appuie sur pause, on veut que ça reste un moment suspendu et particulier. On crée un espace spécifique pour permettre aux parents de concentrer leur attention uniquement sur l’arrivée du bébé » précise Céline Mattelaer.

  • Comment cette ambiance particulière est-elle créée ?

Lors de leur arrivée en pré-hospitalisation, les parents sont baignés dans une ambiance snoezelen directement dans la chambre. L’équipe de la Maternité des Dix Lunes dispose d’un chariot avec du matériel multisensoriel : lumières, musique, colonne à eau,… Tout est mis en place pour les rassurer et les mettre en confiance dès le début. Ensuite, cette atmosphère est recréée en salle d’opération et est couplée à une prise en charge très humaine. « On baisse les lumières principales pour que ça soit moins agressif pour le bébé, on permet le peau-à-peau dès que cela est possible, on fait tout pour que les parents et le bébé puissent se rencontrer au plus vite » précise Céline Mattelaer.

  •  Comment se déroule une césarienne snoezelen ?

Après la phase de pré-hospitalisation instaurant déjà une ambiance snoezelen, les parents sont invités à être acteurs de l’arrivée de leur bébé. La première démarche est donc de leur proposer de rejoindre le quartier opératoire à pieds. Céline Mattelaer ajoute « le fait d’aller à pieds rend le couple acteur, la maman ne doit pas forcément être une patiente passive dans un lit ». Néanmoins, la maman a aussi la possibilité de se rendre en salle d’opération allongée dans son lit.

Ensuite, la maman est installée en salle d’opération pour procéder à la pose de la rachianesthésie. Cette dernière permet à la maman de rester consciente sans sentir la douleur. L’anesthésiste injecte une dose d’anesthésique dans le dos qui endort en quelques minutes le bas du corps et est efficace pendant 2 à 3h. Durant cette étape, le co-parent peut déjà être présent si l’anesthésiste a donné son feu vert. « Certaines femmes ont vécu des accouchements précédents traumatisants. Elles sont dans un tel état de panique que le fait d’être accompagnées par le co-parent dès le début va les rassurer » précise le Dr Burrini.

Par la suite, l’ambiance snoezelen est instaurée dans la salle d’opération. « Lors de cette césarienne, on se tait, on met la musique choisie par les parents, on adapte la lumière selon leurs envies, mais on est surtout à l’écoute » ajoute le Dr Burrini. En effet, l’équipe composée des infirmières de salle d’opération, de l’anesthésiste, des gynécologues, de la sage-femme et du pédiatre se tient à la disposition des parents tout au long de la procédure. Leur rôle est de garantir le confort et la sécurité physique et affective des parents, mais surtout de leur bébé. À l’écoute et disponible, l’équipe permet aux parents d’exprimer librement leurs craintes. Tout est pensé pour rassurer les parents et les accompagner au mieux dans cette fabuleuse étape qu’est la mise au monde de leur enfant.

Par ailleurs, un ciel étoilé peut être projeté sur le drap et le champ stérile peut être relevé créant ainsi un cocon. Si souhaité, celui-ci pourra être abaissé, offrant ainsi aux parents une vue directe sur l’arrivée de leur bébé. Depuis peu, l’équipe travaille aussi avec un nouvel accessoire : le winner flow. Il s’agit d’un petit embout en plastique ressemblant à un sifflet dans lequel la maman peut souffler et gérer la force de poussée au moment de l’expulsion.

« En utilisant cet outil lors de la césarienne, les mamans sont véritablement actrices de leur accouchement car on les fait pousser au moment où le gynécologue sort le bébé. Elles se réapproprient ainsi l’accouchement, ce qui peut diminuer la frustration d’être sous rachianesthésie » précise Céline Mattelaer. Utilisé aussi pour les accouchements par voie basse, le winner flow possède une résistance à l’intérieur, calibrée au préalable, qui reste constante tout au long de l’expiration. En expirant dans le sifflet, la maman permet au bébé de se positionner dans le bon axe afin de mieux solliciter le col, puis de descendre dans le bassin.

Enfin, la sage-femme accueille le nouveau-né dans un drap absorbant et doux, et le présente immédiatement aux parents. Après un premier examen pédiatrique rapide, le cordon ombilical est coupé et le peau-à-peau peut avoir lieu jusqu’à la fin de l’intervention. Le Dr Burrini ajoute « dans la mesure du possible, on fait couper le cordon par le co-parent, mais tout dépend de la situation, des circonstances, dans le respect des règles de stérilité d’un bloc opératoire ».

  • Comment se déroule l’après césarienne ?

Lorsque la césarienne est terminée, toute la famille revient ensemble à la maternité, guidée par les sages-femmes. Les parents et le bébé ne sont pas séparés, ils ne passent pas par la salle de réveil. « La surveillance post-opératoire est réalisée dans la chambre et est assurée selon toutes les règles de sécurité dans une ambiance snoezelen également » précise Céline Mattelaer.

  •  Comment répondre au mieux aux attentes des parents ?

Pour répondre à leurs attentes, il faut leur permettre de les exprimer. Dès que la césarienne est programmée, le gynécologue propose aux parents de rencontrer la sage-femme en consultation prénatale afin de discuter du projet de césarienne et de leurs attentes pour l’arrivée de bébé. Le Dr Burrini ajoute aussi « on peut presque parler de césarienne à la carte, il y a une trame de base mais rien n’est systématique, tout est spécifique. On s’adapte aux souhaits des futurs parents, même si parfois nous devons revoir les choses avec eux car ils comprennent qu’on ne peut pas accéder à leur demande ».

  • Quels sont les bénéfices d’une césarienne snoezelen ?

Du côté du bébé, il va pouvoir rencontrer directement ses parents et ainsi être rassuré. Le peau-à-peau rapide contribue au maintien de sa température et lui permet la mise au sein si elle souhaitée par la maman. Le fait d’être très vite proche de ses parents va contribuer à une évolution physiologique très positive.

Par ailleurs, l’attention de la maman étant pleinement centrée sur son bébé, sa production naturelle d’endorphines induit une diminution des besoins en antidouleurs, elle se sent mieux en période post-opératoire, elle a moins de nausées,… En allaitant directement, elle stimule rapidement le phénomène de lactation.

Céline Mattelaer ajoute « Tout est fait pour que le bébé soit bien. Ce n’est pas juste du confort, ça va au-delà de cela. On répond au besoin d‘attachement du bébé et un vrai lien s’installe rapidement entre le bébé et ses parents. La maman participe aux premières heures de la vie de son bébé, le peau-à-peau est directement assuré par la maman ».

  • Comment l’ambiance snoezelen a-t-elle été introduite à EpiCURA ?

Sans le savoir, l’équipe faisait déjà du snoezelen depuis de nombreuses années, « on ne mettait pas un terme sur la technique, mais on s’adaptait déjà aux besoins des parents » précise le Dr Burrini. Avec l’expérience, l’équipe a aussi constaté l’importance majeure du langage verbal et corporel du personnel lors des accouchements par césarienne. Les parents peuvent ressentir du stress lors de l’utilisation d’un langage anxiogène et ils n’ont pas forcément besoin d’entendre des banalités. L’équipe créée donc un contexte particulier, soigne son langage, et assure la surveillance post-opératoire en chambre depuis longtemps. 

Il y a 5 ans, les membres de la Maternité des Dix Lunes ont ensuite suivi une formation spécifique. Cette dernière a permis de baliser les principes fondamentaux du snoezelen et de l’appréhender comme une approche globale. Céline Mattelaer précise « ce n’est pas spécifique à la césarienne, les accouchements par voie basse se déroulent comme ça aussi, tous nos soins néonataux aussi. C’est une philosophie de prise en charge globale ».

L’introduction du snoezelen en salle d’opération est donc le fruit d’un travail de longue haleine et d’une collaboration accrue entre tous les membres de l’équipe. Avant que cela ne fonctionne totalement, le personnel a dû être informé et formé afin de prendre conscience de l’importance du projet.

Par ailleurs, la maternité athoise dispose aussi d’une salle snoezelen à disposition de tous. « On peut y installer des couples ou des familles qui ont vécu un accouchement difficile. Cela leur permet alors de se réapproprier la maternité, de prendre du temps pour eux » précise Céline Mattelaer. Cette zone tampon est également accessible aux personnes qui ont vécu un accouchement sans encombre mais qui ont besoin d’une pause après l’agitation que génère l’arrivée d’un enfant. « Les parents fatigués, les femmes en pré-travail ou les mamans qui ont subi une césarienne non-programmée sont aussi les bienvenus » conclut le Dr Burrini.